Les Amours de Michel Hubert-Descours avec Mademoiselle Marie Jacqueline Fabre
Parties concernées : L'art (partie II) + Annexe 5
Chapitres concernés : Le processus de création (chapitre 2) / L'atelier (pages 334-347) + Annexe 5 / Dictionnaire des élèves et collaborateurs de l'atelier (pages 600-602)
Nature de la mise à jour : Nouveaux éléments sur Michel Hubert-Descours
La maison de vente Audap-Mirabaud proposera à Paris le 29 novembre 2017 un émouvant tête-à-tête entre le peintre Michel Hubert-Descours [1] (Fig.1), formé dans l'atelier de Hyacinthe Rigaud, et son épouse, Marie Jacqueline Fabre [2] (Fig. 2), sous la forme de deux portraits ovales, peints en pendant par Descours au seuil de sa vie, que nous avions mentionnés en 2016 au titre de ses œuvres seulement connues par le témoignage de l'abbé Porée, son premier biographe, dans le cadre de notre Dictionnaire des élèves et collaborateurs de l'atelier [3].
Fig. 1a : Michel Hubert-Descours, Autoportrait, 1770, collection particulière
(c) Audap-Mirabaud
Fig. 1b : Michel Hubert-Descours, Autoportrait (dos), 1770, collection particulière
(c) Audap-Mirabaud
Fig. 2a : Michel Hubert-Descours, Portrait de Marie Jacqueline Descours, née Fabre, 1770, collection particulière
(c) Audap-Mirabaud
Fig. 2b : Michel Hubert-Descours, Portrait de Marie Jacqueline Descours, née Fabre (dos), 1770, collection particulière
(c) Audap-Mirabaud
Michel Hubert-Descours dit Descours (1707-1775) est issu d’une des familles les plus notables et les plus anciennes de Bernay, qui se décomposait au milieu du XVIIe siècle en trois branches : les Hubert-La Famille, branche aînée ; les Hubert de La Huberdière et les Hubert-Descours.
Fils de Michel Hubert-Descours et de Françoise Devaux, il naquit à Bernay le 12 septembre 1707 et mourut le 16 novembre 1775 dans sa ville natale où il fit toute sa carrière. Il montra des dons précoces pour la peinture, comme en témoigne un Autoportrait, daté de 1727 (château de Plainville, collection particulière). Grâce au livre de souvenirs qu’il a laissé, Les Amours de Mr. Hubert Descours avec Mademoiselle Marie F… Ecritte par luy même en l’an 1737, dont nous avons établi l'édition commentée en complément du catalogue des œuvres de l’artiste (à paraître) [4], on connaît par le menu sa formation et ses aventures de jeunesse.
En 1731, il vint en effet à Paris et y suivit l’enseignement de Rigaud [5], fréquentant selon Michel Faré Nicolas Desportes (1718-1787), un autre élève du Catalan : le « premier peintre du roi […] ne fit sous ces auspices [une lettre de recommandation] aucune résistance pour me recevoir chez lui en qualité d’élève. » [6]. De son propre aveu, il serait resté quatre ans dans la capitale. De cette époque datent notamment une Descente de Croix (1732, musée de Bernay) et un portrait de femme en buste (huile sur toile, 1734, H. 0,75 x L. 0,59 m, vente Neuilly, Aguttes, 17 septembre 2017, lot 38).
Après un retour à Bernay qui dura huit mois, Descours revint à Paris et y retrouva un condisciple d’atelier, Fabre [7], qui habitait rue de la Mortellerie. Descours s’éprit de la plus jeune des sœurs de Fabre. Mais l’oncle de la jeune fille, Jean Claude Fabre (1668-1753), prêtre de l’Oratoire et janséniste notoire, ainsi que le père de Descours s’opposèrent au mariage. Finalement, Michel obtint le consentement paternel et épousa le 15 octobre 1737 en l’église Saint-Paul à Paris Marie Jacqueline Fabre. Le couple eut trois enfants, deux filles et un garçon, Michel Pierre, qui devint peintre à son tour. Quelques années après la naissance de son fils en 1741, Descours revint s’installer à Bernay. C’est à Bernay, ville prospère, où il se fixa définitivement, que Descours exécuta l’essentiel de son oeuvre qui consiste en portraits, en sujets religieux et en trumeaux décoratifs. Sa clientèle fut très nombreuse et se partagea entre élites et confréries locales. Ses compositions, un peu figées, montrent cependant une très grande attention au rendu des tissus et des accessoires ; les mains y occupent une place prédominante, comme en témoignent nos deux portraits en pendant, Descours reprenant dans le sien un geste dont son propre maître usa pour lui-même (Fig. 3) à l'imitation de Van Dyck.
Fig. 3 : Hyacinthe Rigaud, Autoportrait, après 1697, Karlsruhe, Staatliche Kunsthalle, inv. 476
(c) Ariane James-Sarazin / droits réservés
Le chef-d'oeuvre de Descours est également un portrait intime, où il ambitionne de faire montre de toute l'étendue de son talent, à travers différents registres (portrait, scène de genre, nature-morte, peinture animalière) : il y représente Marie Jacqueline, à l'aube de la trentaine, en compagnie d'un petit serviteur noir [8] (Fig. 4), hommage virtuose à ses amours un temps contrariées, mais finalement fort heureusement comblées...
Fig. 4 : Michel Hubert-Descours, Portrait de Marie Jacqueline Descours, née Fabre, 1746, collection particulière
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Notes
[1] Huile sur toile ovale, H. 0,59 x L. 0,50 m, inscription au dos recopiée, après rentoilage, d'après celle figurant sur la toile d'origine : Michel Hubert // Descours // agé de 63 ans //Peint par // luy-même // en 1770, vente Paris, Drouot, Audap-Mirabaud, 29 novembre 2017, lot 68, repr. Selon l'abbé Porée (Un peintre bernayen, Michel Hubert-Descours (1707-1775), Bernay, 1889, p. 15), cet autoportrait de Descours, ainsi que le portrait en pendant de son épouse, auraient appartenu à une parente, la dame Anquetin d'Evreux, chez qui ils côtoyaient un portrait de leur fils, le peintre Michel Pierre Descours, puis à M. de Beaufort au Petit-Andelys. Leur localisation était inconnue de Porée en 1889.
[2] Huile sur toile ovale, H. 0,60 x L. 0,50 m, inscription au dos recopiée, après rentoilage, d'après celle figurant sur la toile d'origine : Marie Jacqueline // Fabre de Paris // agée de 53 ans et // peinte par Descours //son mari // en 1770, vente Paris, Drouot, Audap-Mirabaud, 29 novembre 2017, lot 69, repr.
[3] Voir Ariane James-Sarazin, Hyacinthe Rigaud (1659-1743), tome I : L'homme et son art, Dijon, Editions Faton, 2016, p. 602.
[4] Nous avons proposé un premier recensement de l'oeuvre peint de Descours dans Ariane James-Sarazin, op. cit., p. 600-602.
[5] Ce que confirme Dezallier d'Argenville, Abrégé de la vie des plus fameux peintres avec leurs portraits gravés, Paris, 1745, tome 2, p. 413.
[6] V. Péché, « Les débuts d’un jeune peintre », Histoires d’objets. Regards croisés sur le patrimoine mobilier de l’Eure, Milan, 2009, p. 272.
[7] Voir Ariane James-Sarazin, op. cit., p. 603-604.
[8] Huile sur toile, H. 1,49 x L. 1,13 m : vente après décès du baron Davillier, Paris, Drouot, 13-15 avril 1905, lot 193, repr., acquis 3 000 francs par M. Féral ; vente anonyme, Paris, Drouot, Bellier, 18 juin 1941, lot 11 ; vente anonyme, Monaco, Christie’s, 7 décembre 1987, lot 102, repr. ; chez Gismondi, Paris, 1988 ; collection Robert de Balkany, Paris ; sa vente, Paris, Sotheby's, 20 septembre 2015, lot 15, repr.
Pour citer cet article
Référence électronique
Ariane James-Sarazin, "Les Amours de Michel Hubert-Descours avec Mademoiselle Marie Jacqueline Fabre'", Hyacinthe Rigaud (1659-1743). L'homme et son art - Le catalogue raisonné, Editions Faton, [en ligne], 8 novembre 2017, URL : http://www.hyacinthe-rigaud.fr/single-post/2017/11/08/Les-Amours-de-Michel-Hubert-Descours-avec-Mademoiselle-Marie-Jacqueline-Fabre