Précieuse réduction : Rigaud et le portrait en petit d'un gentilhomme inconnu
Catalogue concerné : I. Catalogue des portraits peints / Portraits d'attribution certaine
Période : Quatrième période (de 1699/1700 à 1709/1710)
Numéro déjà catalogué : P.1111 (page 371)
Rubrique concernée : Réplique conservée Nature de la mise à jour : précision apportée sur une oeuvre déjà cataloguée
Fig. 1 : Hyacinthe Rigaud, Portrait d'un homme inconnu, vers 1705-1710, collection particulière
(c) Ariane James-Sarazin / droits réservés
PRÉCISION APPORTÉE à une OEUVRE déjà CATALOGUÉE
Ht à vue ovale et bords biseautés. H. 0,54 ; L. 0,43 m ; inscription ancienne sur une étiquette au dos de la toile : ce tableau que j’ai acheté restera ma propriété Humbert Delfressy [ou Desfressy]
Coll. part.
Hist. : Peint après 1703, vers 1705-1710 ; coll. Humbert Delfraissy ou Desfraissy (orthographes les plus courantes selon Geneanet) ; galerie Benedikt Korth ; vente anonyme ; vente Cologne, Van Ham Kunstauktionen, 16 mai 2008, lot 416, repr. p. 112 (Rigaud, vers 1728-1730, notice rédigée avec la collaboration de Stéphan Perreau) ; coll. part. ; Kunstsalon Franke-Schenk, Munich ; coll. part., Allemagne ; vente Paris, Artcurial, 14 novembre 2017, lot 493, repr.
Bibl. : Stéphan Perreau, Hyacinthe Rigaud. Catalogue concis de l'oeuvre, Sète, 2013, n° P.1359 (vers 1710-1730) ; Ariane James-Sarazin, Hyacinthe Rigaud (1659-1743), Dijon, Editions Faton, 2016, tome II : Le catalogue raisonné, n° P.1111, repr. p. 371 (après 1703, vers 1705-1710).
Exp. : 2013, Munich, Kunstsalon Franke-Schenk, Centenary exhibition, 1913-2013, n° 25.
Participant d'une actualité automnale particulièrement riche pour tout ce qui touche à la production de Hyacinthe Rigaud, la maison de ventes Artcurial présentera le 14 novembre prochain un petit portrait d'homme en buste (Fig. 1) que nous avions pu examiner en novembre 2011 et rapprocher de son prototype en grand, jusqu'aux genoux [1] (Fig. 2), dont nous avions retrouvé la trace dans le catalogue d'une vente à Drouot, le 13 décembre 1922. Alors attribuée à Nicolas de Largillierre et donnée comme portrait présumé de La Bruyère, cette toile, aujourd'hui non localisée, avouait pourtant très clairement sa dette envers une composition récurrente chez Rigaud [2] (Fig. 4 à 7), dont nous avons proposé en 2016 d'identifier l'un des premiers témoignages avec le portrait de Mathias Milani de la Roque, peint par le Catalan en 1701- 1703 [3] (Fig. 3).
Fig. 2 : Hyacinthe Rigaud, Portrait d'un homme inconnu, vers 1705-1710, localisation actuelle inconnue
(c) Ariane James-Sarazin / droits réservés
Fig. 3 : Hyacinthe Rigaud, Portrait de Mathias Milani de la Roque, 1701-1703, collection particulière
(c) Ariane James-Sarazin / Philippe Salinson / droits réservés
La perruque de notre inconnu, encore assez haute, mais moins ample qu’à la période 1700-1705, justifie selon nous une datation vers 1705-1710. Elle ne peut en revanche être compatible avec les années 1728-1730, comme l’a proposé en 2008 le catalogue de vente pour la réduction aujourd'hui proposée par Artcurial. Le terme de réduction nous semble en effet le plus approprié, car contrairement à la majorité des répliques en buste qui furent ordinairement tirées, par Rigaud et/ou son atelier, d'une composition en grand, cette petite toile présente des dimensions inférieures à une toile standard de 25 sols (H. 0,81 x L. 0,64 environ) qui permettait de représenter le modèle en grandeur quasi naturelle. Remarquons d'ailleurs la précision de la touche et la facture extrêmement soignée, qui s'apparentent à celles d'un miniaturiste et qui font de ce "portrait en petit", genre très en vogue aux XVIIe et XVIIIe siècles, à l'imitation des tableautins flamands et hollandais et auquel Rigaud sacrifia à plusieurs reprises [4], un objet précieux et raffiné : humidité de l’œil ; carnations franches ; boucles rendues au cheveu près ; légers empâtements au niveau de la chemise ; traitement pointilliste de la dentelle et des impacts lumineux sur les boutons d’argent ou le brocart, plus allusif dans les moirures de la soie. Il semble que Rigaud ait réemployé pour l'occasion une toile qui avait servi à une autre composition, comme le suggère l'ébauche de deux grelots, bien visibles dans le coin supérieur gauche, que nous avions découverts lors de notre examen de l'oeuvre en 2011, en lui enlevant son cadre.
Fig. 4 : Hyacinthe Rigaud et atelier, Portrait d'un homme inconnu, vers 1700-1705, Los Angeles, The J. Paul Getty Museum, inv. 86.GB.612
(c) Los Angeles, The J. Paul Getty Museum
Fig. 5 : Hyacinthe Rigaud, Portrait d'un homme âgé, vers 1710-1715, collection particulière
(c) Ariane James-Sarazin / droits réservés
Fig. 6 : Hyacinthe Rigaud, Portrait de Peder Benzon Mylius, 1721, Copenhague, Statens Museum for Kunst, inv. KMS 4003
(c) Copenhague, Statens Museum for Kunst
Fig. 7 : Hyacinthe Rigaud, Portrait d'un homme inconnu, vers 1730, collection particulière
(c) Ariane James-Sarazin / droits réservés
Notes
[1] Voir Ariane James-Sarazin, Hyacinthe Rigaud (1659-1743), Dijon, Editions Faton, 2016, tome II : Le catalogue raisonné, n° P.1111, p. 371.
[2] Voir ibid., notamment les n° P.1143, P.1373, P.1444 et D.89.
[3] Voir ibid., n° P.760, p. 252-253.
[4] On en donnera pour seul exemple l'extraordinaire portrait en petit de Charles d'Hozier : voir ibid.,
n°P.256, p. 91.
Pour citer cet article
Référence électronique
Ariane James-Sarazin, "Précieuse réduction : Rigaud et le portrait "en petit" d'un gentilhomme inconnu", Hyacinthe Rigaud (1659-1743). L'homme et son art - Le catalogue raisonné, Editions Faton, [en ligne], mis en ligne le 18 octobre 2017, URL : http://www.hyacinthe-rigaud.fr/single-post/2017/10/18/Précieuse-réduction-Rigaud-et-le-portrait-en-petit-dun-gentilhomme-inconnu