Un portrait dans le sillage de deux magistrats peints par Hyacinthe Rigaud
Catalogue concerné : I. Catalogue des portraits peints / Portraits d'attribution certaine
Période : Troisième période (de 1690/1691 à 1699/1700)
Numéros déjà catalogués : P.488 (pages 162-163) et P.673 (page 228)
Rubrique concernée : Analogies
Nature de la mise à jour : ajout d'une analogie
Fig. 1 : Anonyme d'après Hyacinthe Rigaud, Portrait d'un magistrat, après 1696, collection particulière
(c) cliché Steve Dutot
NOUVELLE ANALOGIE COMMUNE aux DEUX PORTRAITS P.488 et P.673
Anonyme d'après Hyacinthe Rigaud
Magistrat inconnu
Ht. H. 1,28 ; L. 0,99 m
Coll. part.
Hist. : vente Maubeuge, hôtel des ventes du Hainaut, Guillaume Thomas-Thomas maison de ventes, 25 mars 2017, lot 20, repr. (école de Hyacinthe Rigaud, Portrait de magistrat).
Comme l'indique de manière tout à fait pertinente la notice rédigée à l'occasion de la vente du 25 mars 2017 à Maubeuge avec la collaboration de l'expert Patrice Dubois, ce portrait de magistrat inconnu s'inspire d'une composition à succès de Hyacinthe Rigaud que le maître prêta notamment à deux autres personnalités de la noblesse de robe au mitan de la décennie 1690 : Jean Duret (1666-1735), seigneur de Grigny, qui fut premier président au bureau des finances de la généralité de Lyon, sa ville natale, à partir de 1692 et qui commanda son portrait en 1696 pour 300 livres, soit un format jusqu'aux genoux [1, Fig. 2] ; François Secousse, dont on ne sait presque rien, si ce n'est qu'il assuma les fonctions de procureur au Parlement de Paris [2, Fig. 3].
Fig. 2 : Hyacinthe Rigaud, Portrait de Jean Duret, 1696, Norfolk, Chrysler Museum of Art, inv. 77.409
(c) Norfolk, Chrysler Museum of Art
Il est difficile de savoir si nous sommes en présence d'une oeuvre qui reprend seulement à son compte une pose et des accessoires appartenant bien au répertoire rigaldien, mais en les prêtant à une physionomie que Rigaud lui-même n'aurait jamais eu à représenter, ou bien si elle copie plus largement un portrait du maître dont la trace aurait été perdue et dont elle serait le reflet convaincant. Il est en tout cas certain, les deux effigies précédemment citées de Jean Duret et de François Secousse n'ayant jamais fait l'objet d'une transcription gravée, que notre artiste anonyme eut une connaissance directe de l'une des deux, et plus particulièrement de celle représentant François Secousse, dans la mesure où il en reprend la couleur du dossier du fauteuil dans lequel il assied son modèle.
Fig. 3 : Hyacinthe Rigaud, Portrait présumé de François Secousse, vers 1696, Lyon, musée des Beaux-Arts, inv. A 2726
(c) Lyon, musée des Beaux-Arts / cliché Alain Basset
On notera cependant quelques différences de composition : le portrait proposé en vente à Maubeuge obéit à un format resserré, tant en hauteur (le piétement de la table s'arrêtant plus haut) qu'en largeur, notamment sur la droite. Le décrochement du motif sculpté de la table est davantage accentué. Manchettes et rabat s'ornent de fines dentelles. A la main droite, le modèle porte une bague sertie de pierres blanches et rouges [Fig. 4], tandis que sa main gauche repose, non pas sur un in-folio dressé comme pour Jean Duret et François Secousse, mais plus aristocratiquement, sur une canne à pommeau d'argent, dont usa également Rigaud dans certains de ses portraits tel celui de Niccolo Cattaneo della Volta [3, Fig. 5], peint en 1705 et identifié par Daniele Sanguineti. La perruque, aux formes arrondies et opulentes, situe la commande de notre portrait entre la fin de la décennie 1690 et le début des années 1700. Par son caractère compact, elle diffère de la manière rigaldienne, tout comme le traitement assez sommaire des plis de la robe noire. Mais il y a fort à parier qu'une restauration permettrait de rendre davantage de subtilité à ceux-ci, ainsi qu'aux carnations, car l'artiste, fort bien instruit, selon toute apparence, des procédés du maître, n'omet pas d'ourler la paupière inférieure de l’œil droit d'une légère humidité qui par son tremblement confère beaucoup d'acuité au regard. Quant à la physionomie du modèle, elle est suffisamment singulière pour permettre, dans un proche avenir, de la rendre à son identité pleine et entière.
Fig. 4 : Anonyme d'après Hyacinthe Rigaud, Portrait d'un magistrat (détail de la main droite), après 1696, collection particulière
(c) cliché Philippe Neveux
Fig. 5 : Hyacinthe Rigaud, Portrait de Niccolo Cattaneo della Volta, 1705, collection particulière
(c) droits réservés / Ariane James-Sarazin
Notes
[1] Huile sur toile, H. 1,35 ; L. 1,04 m, inscription au niveau du pied de la table à gauche : fait par hyacinthe Rigaud. 1696, Etats-Unis, Norfolk, Chrysler Museum of Art, inv. 77.409 ; voir Ariane James-Sarazin, Hyacinthe Rigaud (1659-1743), tome II : Le catalogue raisonné, n° P.488, p. 162-163, repr. p. 162.
[2] Huile sur toile, H. 1,39 ; L. 1,06, vers 1696, France, Lyon, musée des Beaux-Arts, inv. A 2726 ; voir Ariane James-Sarazin, op. cit., n° P.673, repr. p. 228.
[3] Huile sur toile ovale, H. 1,02 ; L. 0,82 m, inscription sur une étiquette au dos de la toile actuelle retranscrivant une mention visible sur la toile d'origine : Fait // par Hyacinshe [sic] // Rigaud a // Paris // 1705, collection particulière ; voir Ariane James-Sarazin, ibid., n° P.913, p. 308-309, repr. p. 308.
Pour citer cet article
Référence électronique
Ariane James-Sarazin, "Un portrait dans le sillage de deux magistrats peints par Hyacinthe Rigaud", Hyacinthe Rigaud (1659-1743). L'homme et son art - Le catalogue raisonné, Editions Faton, [en ligne], 16 mars 2017, URL : http://www.hyacinthe-rigaud.fr/single-post/2017/03/16/Un-portrait-dans-le-sillage-de-deux-magistrats-peints-par-Hyacinthe-Rigaud